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Posté dans divers par kerbacho - Date : août 22nd, 2005

Ce billet est le centième de ce débloque-notes.

Je vis depuis plus de 20 ans en Belgique et je travaille en Hollande avec des Néerlandais, des Allemands, des Français et des Anglais. Malgré mes efforts, je cède encore de temps en temps à la tentation de la généralisation pour essayer de comprendre mes collègues. Ainsi ai-je eu assez vite l’impression que si les Néerlandais n’aimaient généralement pas les Allemands, c’est parce qu’ils détestaient chez eux des traits inavoués de leur propre caractère.
Je n’ai pas encore compris pourquoi les Allemands n’aimaient pas les Néerlandais.
Or dans un texte d’un certain Ian Buruma intitulé Lorsque j’ignorais tout de l’Holocauste : une enfance aux Pays-Bas, je trouve aujourd’hui ceci :

    « Il est intéressant de noter que la plupart des Néerlandais ont toujours eu et conservent, ne serait-ce que de manière diffuse, une idée de l’Allemagne qui est le négatif de celle qu’ils ont d’eux-mêmes, tant il est vrai qu’ils ont toujours considéré comme typiquement allemandes des caractéristiques qu’ils refusaient pour eux-mêmes. »
    Il ajoute qu’on peut « détecter le phénomène inverse en Allemagne, où les écrivains néerlandais recueillent un succès énorme depuis dix ou douze ans. Je suppose que cela n’est pas sans lien avec le fait que de nombreux Allemands se représentent les Pays-Bas comme une version améliorée de leur propre pays : une culture fondamentalement similaire, mais plus souple, plus libérée. »

Dans ce même texte, Ian Buruma parle de l’habitude étrange de certains supporters (nombreux) de l’équipe Ajax d’Amsterdam d’arborer le drapeau israélien « pour la seule raison qu’Amsterdam avait jadis compté un nombre élevé de juifs et que ceux qui avaient été suffisamment riches étaient devenus membres de leur club. Plusieurs joueurs, y compris des goys, se sont enorgueillis de cette identification juive. »
Ian Buruma relate encore que ce délire apparemment commencé dans les années 70 perdurait dans les années 90, où, lors d’un match de l’Ajax, il a entendu les supporters de l’équipe adverse produire « des sifflements censés imiter le bruit sinistre des chambres à gaz. »

Je ne fréquente pas les stades de foot, et pourtant j’ai croisé la route d’insupportables supporteurs.
Cela me fait penser qu’il faut que j’achète un pot de peinture bleue.

Ian Buruma enseigne aux Etats-Unis. Les citations sont extraites du texte d’une conférence donnée à Amsterdam en 2004, et publié en 2005 dans la revue trimestrielle Septentrion