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Posté dans MOTS par kerbacho - Date : août 4th, 2009

« For what to shun will no great effort need,
But what to follow, is a task indeed. »
Alexander Pope

« Il faut mesnager la liberté de nostre âme et ne l’hypothéquer qu’aux occasions justes » :
Montaigne

Adieu Gangubai Hangal

Posté dans ÉCOUTER, HINDOUSTAN, MOTS par kerbacho - Date : juillet 23rd, 2009

Incroyable… je viens de vérifier en cherchant « Hangal » sur ce site et je découvre que je n’y ai mentionné qu’une seule fois Gangubai Hangal, en passant d’ailleurs.
Je viens d’apprendre son décès le 20 juillet, à l’âge respectable de 97 ans, dans sa ville natale de Hubli.
A cette nouvelle, l’angoisse m’étreint. Je me sens orphelin.

Il faudrait pourtant s’efforcer de ne pas être triste. En se remémorant par exemple son concert à Gand, avec sa fille Krishna Hangal et sa (très belle) petite fille, et la brève rencontre en coulisses, au cours de laquelle Gangubai m’avait donné son accord pour filmer son concert (« à condition de ne pas déranger les autres spectateurs » avait-elle précisé avec un grand sourire).
En se souvenant des innombrables heures d’écoute de cette voix unique, mutante, minérale, dure comme on dit du bois de chêne qu’il est dur, profonde comme on dit d’un sommeil qu’il est profond.

Je me sens orphelin aussi parce que j’associais Gangubai au souvenir d’une grand-tante par alliance à qui elle ressemblait beaucoup. On l’appelait Tandé Marie, elle venait avec ses deux filles Mathilde et Marie prier aux veillées funèbres. Là où tout le monde chuchotait en sanglotant, ou ânonnait les prières dans la componction, Tandé Marie prononçait les litanies d’une belle voix forte, comme celle de Gangubai, sans émotion ni trémolo, en trio avec ses deux filles, avec une conviction et une vigueur dont, enfant, je pensais qu’elles avaient le pouvoir de réveiller le mort que l’on entourait.
Pourvu qu’à Hubli il se trouve ce soir quelques chanteuses à la voix bien assurée pour célébrer haut et fort l’adieu de l’humanité à cette femme extraordinaire.
Tandé Marie avait pour habitude de ponctuer ses conversations optimistes, simples et gaies d’un roboratif : «A la bonne heure !» d’autant plus surprenant qu’elle ne parlait pas le français.

Gangubai Hangal – Raga Bhairavi (avant que sa voix ne mue dans le grave)

Puis quelques années plus tard, toujours en pleine possession de ses moyens :

Gangubai Hangal – Raga Chandrakauns | Teental

Et après, pour se consoler ou au contraire pour bien se mettre dans la tête que tout ça c’est du passé, on peut se perdre des heures durant dans le dossier de Kulkarni sur esnips qui ne contient que des merveilles.

Frayé aux ars

Posté dans MOTS par kerbacho - Date : juin 27th, 2009

Il existe un mot pour tout, même pour désigner l’usure des pièces de monnaie en circulation ! On parle du frai. Ce nom est de la même famille que le verbe frayer.
Il y a un mot pour désigner la dégradation importante des chaussées produite par le passage des véhicules. On parle de fraye.
Ce mot désigne d’ailleurs aussi la rainure creusée près du dos de la lame d’un couteau pliant.
Les vétérinaires connaissent le frayement, qui est une inflammation cutanée, un érythème causé par le frottement. On dit d’un cheval qu’il est frayé aux ars quand il y a de l’usure au pli qui se forme à la réunion du poitrail et des membres antérieurs.
Ce mot conviendrait-il pour l’usure de l’âme des gens qui ont beaucoup frayé et depuis longtemps ?
Rien à voir en tout cas avec l’allemand frei (= libre), ni avec son équivalent anglais free ni avec le néerlandais vrij, que l’on rattache eux à la racine indo-germanique priya = cher, aimé; amical, agréable, épris de, attaché à, bien-aimé, mari, amant, ce qui est cher, agréable; désir, amour; service, faveur, bien-aimée, épouse.

Voter

Posté dans divers, MOTS par kerbacho - Date : juin 20th, 2009

Une injonction décidément bien absurde : « Le vote est obligatoire. »

Quête

Posté dans MOTS par kerbacho - Date : mai 24th, 2009

Merveilleux dictionnaire où je viens de voir par hasard que le mot quête avait un sens dont j’ignorais totalement l’existence, pour désigner en marine l’inclinaison vers l’arrière, notamment d’un mât.

Demeurer

Posté dans MOTS par kerbacho - Date : mai 23rd, 2009

L’amour rend les plus grands des services quand on sait demeurer plus fort que lui.

Joë Bousquet | Lettres à Poisson d’or | 16 mars 1938

Squat

Posté dans MOTS par kerbacho - Date : février 23rd, 2009

Quoi de plus litigieux qu’un squat, siège d’une discorde entre ses propriétaires et ses occupants ? Ces deux mots, aussi dissemblables par leur apparence qu’un propriétaire et un squatteur, sont, comme un propriétaire et son squatteur, étroitement liés l’un à l’autre. Par leurs racines : en effet, litigieux vient du latin litigiosus, formé de litigium (= dispute, procès) + agere (= faire, mener).
Squat vien(drai)t (via l’anglais moderne) de l’ancien français esquatir (= compresser, ou plus précisément expulser en compressant) où l’on reconnait les racines ex + co + agere.
Le plus étonnant, c’est de voir le mot squat, issu de l’ancien français, revenir au français moderne après un détour par l’anglais.

Mathématicien maté

Posté dans MOTS par kerbacho - Date : février 21st, 2009

Lu, à quelques minutes d’intervalle, d’abord cet extrait d’une lettre ouverte de Wendelin Werner* [peu importe à qui] en page 15 du quotidien le Monde du 19 février 2009 :

« [...] c’est uniquement de votre discours et de ses conséquences dont je veux parler ici.[...] Je passerai sur le ton familier et la syntaxe approximative qui sont de nature anecdotique et ont été suffisamment commentés par ailleurs. »

Puis dans l’éditorial de la rédactrice en chef de Livres-Hebdo du 28 novembre 2009, page 5 : « Cette fois, c’est de leurs imprimeurs dont il s’agit. »

La journée avait mal commencé, ce matin, sur France Inter où j’ai entendu quelque chose comme : « C’est des représentants du gouvernement dont les manifestants n’attendent plus rien. »

Tout le monde s’en fout ? Moi pas.

* Médaille Fields 2006 et membre de l’Académie des sciences

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Jacques Izoard

Posté dans ÉCOUTER, MOTS par kerbacho - Date : février 19th, 2009

Je viens d’apprendre le décès de Jacques Izoard, survenu l’année dernière. Cela fait ressurgir le souvenir de ma rencontre improbable dans sa maison liégeoise avec ce poète dont je ne connais(sais) rien. Pour rendre service à une amie parisienne, auteur du livre d’artiste « Bastilles ensevelies » accompagné d’un poème de Jacques Izoard et illustré par elle, j’en avais convoyé un exemplaire (ou les épreuves, je ne me souviens plus au juste) de Paris à Liège.
Dans sa belle maison déglinguée, nous avions bavardé une heure, en parlant de nos métiers respectifs, de sa double vie de prof et de poète, et il me revient à l’instant le souvenir assez imprécis mais insistant d’une anecdote qu’il m’avait racontée ; il s’était retrouvé prisonnier en Albanie (?) pendant 24 heures, parce que lors d’un rencontre de poésie dans un pays voisin, il s’était égaré en se promenant, et s’était retrouvé, sans s’en rendre compte, de l’autre côté d’une frontière, sans papiers, sans visa… Mon souvenir est tronqué, déformé, je vois bien qu’il doit manquer quelque chose à ce récit, car je doute que l’on entre en Albanie par mégarde.
Je me souviens qu’on avait bien ri de cette mésaventure bizarre digne du Désert des Tartares.

Rentrer

Posté dans ÉCOUTER, ENTENDRE, MOTS, REGARDER, VOIR par kerbacho - Date : février 18th, 2009

Vu hier soir au cinéma le film La Vie Moderne de Raymond Depardon.

Sur cette photo de l’affiche du film : Daniel, Abel et Gilberte Jean Roy, avec leur chien

Ce documentaire dure 1h30, une heure et demie qui ouvre directement sur l’éternité.
Trop court. J’aurais aimé que ça dure encore, j’avais l’impression de rentrer chez moi.
Chez Sepp.


Chez Nicolas.