Master Manohar Barve (1910 – 1972)

Manhar Barve aka Manohar Barwe

A l’âge de quatorze ans, ce chanteur et instrumentiste phénoménal avait déjà été honoré de tous les titres que les plus grands musiciens convoitent leur vie durant et n’obtiennent le plus souvent que très tard, trop tard, ou jamais.

    Raga Sarang dhundhungi main apne piya ko

    Raga Patdipkidhan dhan bhag piya mere

Le père de Manohar Barve, Ganpati Rao Gopal Rao Barve a été le disciple de Maulabaksh Khan (aka Moulabax Khan), célèbre musicien de la cour de Baroda, mentionné dans les biographies d’Abdul Karim Khan pour une anecdote instructive, selon laquelle, conformément à la règle traditionnelle de séniorité qui interdisait à des musiciens de rang inférieur de se produire après les grands maîtres, Maulabaksh aurait un jour, dans les années 1890, refusé de chanter après Aliya Khan, l’un des fondateurs de la Patiala Gharana, de passage à la cour de Baroda. En effet, le maharadja (aka Monsieur de Perleminouze), peut-être piqué par l’accueil triomphant fait par sa cour à ce musicien invité, avait mis au défi ses propres musiciens de chanter à leur tour. Or devant le refus de Maulabaksh et de ses collègues musiciens de la cour de Baroda, le prince invita le jeune duo de chanteurs Abdul Karim et son frère Abdul Haque (alors âgés d’une vingtaine d’années et employés pour enseigner la musique aux femmes de la cour), lesquels ne se firent pas prier pour relever le défi. Cette transgression leur valut une célébrité immédiate mais aussi l’opprobre (et l’eau sale) des autres musiciens attachés aux règles de séniorité.
Abdul Karim Khan est aussi le père de Suresh Babu Mane et d’Hirabai Barodekar, mais je m’égare. Tout ça parce que Latafat Hussain chante si bien Patdipki, plus connu sous le nom de Patdeep. On reprendrait bien un peu de Barve pour finir…

    Raga Puriyalogva sune piyarva

N5824 – Cassette HMV STC 04B 7503 (1991) – Great Masters vol.III

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4 Responses to “Master Manohar Barve (1910 – 1972)”

  1. calerexico écrit :

    même après la fin on en reprendrait bien encore…
    quel puriya magnifique, parfaitement mené… j’ai vraiment hâte de rentrer l’écouter bien attentivement.
    [et l'harmonium n'est vraiment pas détestable, il joue son rôle ;) ]

  2. Bernard écrit :

    Tiens, cher Kerbacho, nous parlions ici récemment de Patrick Moutal, je ne sais plus sous quelle rubrique. J’ai emprunté, à la médiathèque, le seul disque de leur catalogue (sauf erreur) où son nom apparaît comme musicien (ref. MW2205). Il y est, en effet, présent à côté du grand Chaurasia comme… second tanpura ! Je pense qu’il faut avant tout le féliciter pour l’honneur et le plaisir qu’il a dû prendre à cette prestation ! (Il a aussi rédigé la notice du disque.)

  3. kerbacho écrit :

    Si vous écoutez les archives de ses émissions de radio consacrées à la musique classique indienne sur France Musique (je crois qu’elles sont sur son site), vous entendrez Patrick Moutal parler de cet enregistrement (ou d’un autre de Hariprasad Chaurasia), plus précisément des conditions dans lesquelles le raga a été choisi et interprété.
    Je pense que les raisons de féliciter et de remercier Patrick Moutal sont heureusement bien plus nombreuses. Si vous ne les connaissez pas encore, je vous envie, car vous avez de belles découvertes à faire.
    Le regard de Moutal sur la musique hindoustanie me paraît beaucoup plus intéressant que celui de Daniélou (dont je me méfie).

  4. Bernard écrit :

    Cher Kerbacho, j’écoute les émissions de Moutal de 1985-1986 en boucle dans la voiture depuis que je les connais, grâce à vous, il y a déjà quelques semaines. Je les trouve extraordinaires, et les ai conseillées depuis à plusieurs personnes.

    Pour ma part, je considère Alain Daniélou comme un auteur irremplaçable, mais il faut savoir le prendre. Ses prises de position, dans tous les domaines, sont marquées par son idéologie ; mais justement, c’est ce qui m’intéresse. Trop d’auteurs ne sont ni chair ni poisson. Ici, nous avons affaire à une pensée consistante, ferme, intelligente, extraordinairement cultivée. Daniélou s’est converti à l’hindouisme, en est devenu fervent, et il en donne une présentation extrêmement informée et cohérente. Nous sommes loin d’une collection de dieux épars, comme on les trouve presque toujours dans les ouvrages sur l’hindouisme. Son « Mythes et dieux de l’Inde » est un de mes livres de chevet. Daniélou, comme vous le savez, était aussi musicien et musicologue, et là aussi, ses prises de position sont excessives (la musique occidentale est qualifiée de totalitaire, et l’harmonie d’agression). Il a sauvé de la ruine de très nombreux documents sur la musique indienne, qui sont maintenant, je crois, à la bibliothèque Marciana de Venise, et a lancé la collection Musique du Monde de l’Unesco à l’époque où la musique indienne n’était connue chez nous que de quelques spécialistes. Mais vous savez cela sans doute.

    Je crois avoir lu la plupart de son œuvre, y compris ses traductions de textes indiens. Je n’ai donc pas vos appréhensions, mais je les comprends. Pour la philosophie indienne, il a reçu l’aval de Louis Renou, ce qui devrait vous rassurer.

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