Régis par les cris

N’est-il pas curieux que la musique indienne, sous prétexte qu’elle n’est pas notée, continue de faire office de référence en matière de liberté et d’improvisation, alors que le cadre dans lequel elle évolue est hautement contraignant, peut-être bien plus strict et plus étroit que celui de la musique occidentale ? Dans bien des cas, avant même que le chanteur ne commence, la seule façon d’accorder sa tanpura suffit à un auditeur averti pour identifier le raga, autrement dit le système de contraintes, dans lequel le chant va évoluer.
Un malentendu, un bruit de papier. Ne sommes-nous pas régis par l’écrit (bien plus que par les cris) ?

A mon sens rien ne définit mieux les liens que la musique indienne entretient avec ses règles que l’image du cerf-volant : The kite is nothing without the string.

    Aussi :
  • Le texte de Georges Perec « amélioré » par Philippe de Jonkheere
  • Rencontre de Louis Sclavis (cl., cl. basse, sax sop.) et Piet van Bockstal (hautbois)
  • Rechercher le riccercare
  • Extrait d’un entretien de Buddhadev Dasgupta. A la question « As an artist when you play a Raga- a sequence of notes, at what stage does the mood come in and at what stage do you start « improvising »? » BDG répondait en 1987 :
    For what we call « improvisation » (in hindustani music) it is not necessary to have the right mood. Improvisation is often mechanical. But it is when the sentiment of the Raga really pervades the notes you are playing and you can feel it, then the Raga really comes alive. It is a totally different kind of sensation and experience. If you are in the state your mind opens up to newer avenues of approach.

PS: après avoir écrit ces quelques lignes je suis tombé par hasard sur un bel exemple d’improvisation en musique indienne. Vilayat Khan joue Raga Darbari Kanada, très bien comme il se doit pour un musicien de son rang, mais par instants dans le jhalla il prend quelques libertés avec l’orthodoxie mélodique de Darbari Kanada. Selon la personne qui a mis cet enregistrement en ligne : « … he gets somewhat playful with Darbari. Nice thing is it works beautifully« .

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