Le temps du loup

Je viens de regarder (sur le portable posé sur un coin de table de la cuisine) le film Le temps du loup de Michael Haneke (rapporté il y a quelques semaines à dos de mule).
Un film dont je ne savais rien avant de l’avoir vu si ce n’est qu’il m’avait été recommandé par Antoine (merci !).

On retrouve la thématique du naufrage des familles, et plus précisément du désarroi des adolescents face à la déliquescence des adultes, présente aussi dans (presque) tous les autres films de cet auteur. L’impossibilité de communiquer entre parents et enfants, notamment au sujet de la mort (« Pour moi, la scène du petit garçon quand l’oiseau s’enfuit et quand l’oiseau est mort, c’est plutôt l’âme du père, c’est un acte métaphorique, si vous voulez. » M.H.), du renoncement, de la perte de la liberté, l’incapacité des parents (souvent de classe sociale bourgeoise, intellectuelle, urbaine chez Haneke) à comprendre leurs enfants, eux-mêmes confrontés aux duretés de la vie.
(Il y aurait à dire sur le fait que le père de Ben et Eva les fait sortir de la pièce juste avant d’être tué par l’intrus qui lui ne se soucie pas de faire sortir son fils).
Le centre du film me semble être la lettre que la fille écrit à son père mort. Avec lui elle arrive donc à communiquer, pour lui dire entre autres choses que la communication avec sa mère est justement impossible.
Le film parle de l’aptitude particulière des enfants et des adolescents à affronter une réalité insupportable pour les adultes.
Les trois jeunes acteurs sont remarquables : Lucas Biscombe, Anaïs Demoustier et surtout Hakim Taleb.

Anaïs Demoustier et Hakim Taleb

Le film n’a sans doute pas eu de succès car on a voulu le voir comme un film post-apocalyptique. Or je doute fort que ce soit le propos de Haneke. La loi de la jungle (par exemple les efforts dérisoires pour récupérer un peu d’eau de pluie), les discours de chefs de meute, l’anecdotique en somme, ne me semblent pas le sujet du film.

Le film (ineptement qualifié de « film d’anticipation intemporel ») a dû déplaire aussi par sa lenteur, ses silences (Dans mes films, il n’y a pas de musique, sauf celle qui est jouée par quelqu’un ou que quelqu’un écoute à la radio. (M.H.), ou encore la forme apparemment cahotique, entre la première partie où l’univers familier s’effondre inexorablement, puis la seconde partie où s’instaure un nouvel ordre social (sans parler du chaos final).
Ces points ne m’ont pas déplu, au contraire. Le film ne me paraît pas aussi raté qu’on l’a écrit. Et pourtant je reste sur ma faim.
Je me demande si mes réserves ne viennent pas en grande partie des conditions de visionnement pas optimales, l’image en tiers d’écran de portable, la compression un peu trop forte, le son pas fameux, le bruit du ventilateur du portable et les cahots de l’animation.
Aurais-je eu la même impression d’insatisfaction dans une salle de cinéma?

Un entretien intéressant du réalisateur .

Répondre

*