Célébration collective

En ces temps de célébration collective et de chants de Noël affadis, je propose de jeter un coup d’oeil au festival Thyagaraja qui se tient chaque année à Thiruvaiyaru près de Thanjavur au bord de la rivière Cauvery, au sud de Chennai et de Pondichery.

161 st Satguru Sri Thyagaraja Aradhana festival – 2008

On remarque au premier plan, côté dames, la chanteuse Suddha Ragunathan (que j’ai eu le plaisir de voir en concert deux fois à Bruxelles, et côté messieurs feu le violoniste Kunnakudi Vaidyanathan (qui ne joue pas, mais que l’on reconnaît aisément à sa coupe de cheveux à la brosse).
On chante ici collectivement cinq des compositions les plus connues et les plus appréciées (parmi des milliers) de Thyagaraja (1767-1847). Les pancharathna kriti ou cinq joyaux.

Les notions de patrimoine culturel, de célébration collective, de transmission orale ont encore ici une dimension qui font réfléchir.
Détail amusant, vers 4:28, le plan sur une personne en train de téléphoner.

Il y a une vingtaine de séquences vidéo sur YouTube qui donnent une bonne idée, me semble-t-il, de l’ambiance. En voici une deuxième qui montre bien la ferveur et la concentration des participants :

Je ne m’en lasse pas… pas plus que du violoniste Kunnakudi Vaidyanathan, personnage assez extravagant. Le voici en action, quelques jours avant son récent décès, avec une très belle chemise, de très beaux bijoux (bagues, collier, bracelet), une très belle serviette sur la mentonnière, un très beau maquillage et quelle musique !

Les musiciens sont souvent mal filmés, par des opérateurs qui n’y connaissent rien à la musique. On appréciera ici quelques gros plans sur les doigts de la main gauche, intéressants pour suivre des yeux l’ornementation mélodique.

Le deuxième morceau est une composition au caractère rythmique très marqué, basée sur un poème au mètre élaboré, appelé Tiruppugazh, et qui malgré les apparences trompeuses pour un auditeur occidental, est un morceau dévotionnel vieux de cinq siècles :

Voici le même étonnant personnage, cette fois en costume occidental, dans un arrangement assez… éclectique :-)

La même chose, mais dans un contexte plus classique :

Le spectateur occidental non initié pourrait douter du sérieux de ce musicien. Voici pour dissiper ses doutes bien légitimes un extrait de film datant des années 1970 où l’on voit Kunnakudi Vaidyanathan avec le grand chanteur Madurai S. Somasundaram (1919-1989) plus connu sous le petit nom de Madurai Somu :

Maruthamalai Mamaniye par Madurai Somu – dans le film Deivam (1971)

Accessoirement cet extrait qui mêle des images documentaires à l’action d’un film de fiction, donne lui aussi un bel exemple de célébration collective. Dans les films documentaires de Louis Malle on trouve de très belles images de ces extraordinaires processions de chars.

Je recommande l’excellent coffret de 8 films de Louis Malle réunis sous le titre « l’Inde fantôme » dont sont extraites ces séquences.

Non seulement les images sont extraordinaires, mais que dire du regard cinématographique et du commentaire de Louis Malle ?

Répondre

*