Rajan & Sajan Misra | Musée Branly | Paris | 5 juin

Compte rendu de concert par Hans Bosma :

Rajan & Sajan Misra, chant | Shubankar Banerjee, tabla | Fida Hussain Khan, harmonium

C’était la première fois que je mettais les pieds dans la très belle salle du Musée Branly. Vue sur les jardins, belle visibilité, son correct. Le week-end indien était essentiellement consacré à Hariprasad Chaurasia avec concerts et master class.
J’ai préféré les frères Misra dont le dernier concert au Théâtre de la Ville m’avait laissé de bons souvenirs. Leur style est très différent des bandhus (duos) du passé : les Ali Brothers chantaient dans le style typique du Penjab : taans étincelants et brillants, Les frères Niaz et Faiyaz Ahmed Khan représentaient le style Kirana ancien, d’avant l’infuence d’Abdul Karim Khan. La particularité des Frères Misra est surtout la prépondérance de Rajan Misra, qui domine le duo de telle façon qu’il s’agit davantage d’un concert en solo avec ce que l’anglais appelle supporting musicians.
Le fait que l’accompagnement au tabla était assuré par Shubankar Banerjee (qui d’ailleurs reçut de Pt. Rajan Misra le sobriquet de « Pandit » , tout comme Fida Hussain Khan, joueur de harmonium que je n’avais pas encore vu en concert) m’avait un peu refroidi. Le style tabla assourdissant dans des solos sans fin ne me convient guère. Les ustads de la précédente génération savaient que l’accompagnement du chant demande autant de finesse que de la discrétion. Des interventions gênantes donc. Passons.

Les chanteurs était visiblement contents d’être là et la présence du grand joueur de pakhawaj Bhawani Shankar dans l’assistance rajoute sans doute à l’évidente volonté des musiciens de faire de leur mieux.
C’est logiquement Rajan Misra qui annonce le premier raga de la soirée : Sudh Kalyan. Un alap très court suivi d’un khayal vilambit : bolana lagi, composition traditionnelle qui est chanté par des chanteurs du gharana de Gwalior tels que Omkarnath Thakur et Kumar Ghandarva.

Rajan&Sajan Misra

Des meends très fins avec tivra ma et Ni très discrets (PR.SNDSPmG etc). Le vilambit est essentiellement tenu par Rajan Misra. Son frère Sajan est plus présent dans le drut tintal dont je n’ai pas reconnu la composition. Des saregamas et des taans d’une belle facture. L’accompagnement à l’harmonium est discret mais efficace. La troisième composition est annoncée comme very ancient. Il s’agit d’un sulpaka tala de dix temps « jane gune gune ». Je ne connais pas ce tala qui a une division bien différente du jhaptal. Des taans forts réussis des deux frères. Cette version de Sudh Kalyan est bien plus aboutie que celle que les deux frères ont enregistrée (avec des bandish différents) sur une cassette Venus il y a bien longtemps. C’est une très belle réussite ici.

Le deuxième raga est Jhinjoti. Une composition (karete laage) dans un drut rupak taal assez lent. La composition démarre sur le 5e temps et les taans entre le 9e et le 5e temps du cycle suivant, un effet très surprenant qui berce l’auditeur, tout à fait dans l’esprit du raga Jhinjoti. Suivent deux autres compositions en tintal que je n’ai pas retenues.

La dernière pièce annoncée était raga Sohini mais à l’entendre il m’a plutôt semblé qu’il s’agissait de Misra Kafi et un bhajan : Shri Ram kripa kero. J’ai l’impression d’avoir déjà entendu cela.
Un bis assez long dans le raga Basant Bahar suivi par Basant. Les organisateurs commençaient à s’impatienter car le concert ne devait durer qu’une heure et demi et nous étions dans la salle depuis déjà deux bonnes heures. Des taans très beaux pour clore le concert.
Dans le désert musical (la saison de musique hindustani à Paris a été particulièrement pauvre cette année) le concert des frères Misra était un des très rares réussites.

Un autre compte-rendu de concert par H.B. : Premkumar Mallik en concert au Théâtre des Abbesses à Paris (oct. 2009)

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