Discipline – vu(e) au Japon

Au Japon, parmi les choses qui frappent d’abord l’Européen (surtout s’il a le tempérament latin), il y a la discipline et le sens de l’organisation.
À la gare par exemple, on se met en double-file, pas pour déposer quelqu’un, mais pour attendre le trains, lequel arrive et reparte évidemment pile à l’heure indiquée sur des panneaux lumineux bilingues parfaitement clairs.
Je n’ai pas eu le coeur de signaler aux autorités la toile d’araignée repérable sous la lampe en haut de la photo, de peur que cette dénonciation n’accule au suicide le chef de gare déshonoré ou d’un de ses subalternes.

Gare de Kyoto – juin 2010

Que l’on soit jeune ou moins jeune, coiffé ou décoiffé comme ceci ou comme cela, on est discipliné, et on attend patiemment comme tout le monde en double file sur les quais de gare et de métro.

Gare de Kyoto – juin 2010

Quand un train arrive, les voyageurs qui descendent passent sans se bousculer entre les deux files de voyageurs qui… ne montent pas avant que les autres soient descendus.

Les chauffeurs de taxi ne portent pas de casque ni de gants blancs mais s’entourent de dentelle. Leur carte d’immatriculation n’est pas bilingue, mais elle apparaît en trois ou quatre exemplaires dans la voiture.

Les gants blancs sont omniprésents, même sur les mains des hommes politiques dont on sait qu’ils ont, au Japon, les mains pourtant assez sales. Ce bus de propagande politique est arrêté à un grand carrefour devant la gare d’Osaka et le harangueur débite sa propagande (dans laquelle je ne reconnaissais que le mot «America» qui revenait sans cesse), tandis qu’un personnage salue la foule en agitant doucement sa main gantée. Des heures durant dans un vacarme de foire.

En fait de foule, personne, à part moi et la jeune femme en blanc, pensive, appuyée contre le mur à droite du bus, ne semble prêter la moindre attention à ce rituel dont la nuisance sonore est particulièrement désagréable.

Les ouvriers n’ont pas de gants blancs, mais ne quittent jamais leur casque de chantier, même dans la rue.

Devant chaque chantier, chaque parking, il y a un ou plusieurs gardiens.

Casque et uniformes : gardiens au carrefour de la gare d’Osaka, devant l’immeuble du grand magasin Yodobashi.

Dans ce grand magasin d’électro-ménager à la japonaise, on essaye de vous faire voir la vie en rose, mais l’ambiance comme partout en ville m’a paru plutôt morose. Les Japonais et surtout les Japonaises que j’ai vus se départir de leur expression de préoccupation impénétrable, affichaient aussitôt un sourire certes radieux mais qui finalement m’a paru tout aussi distant et hermétique.

Osaka – Yodobashi – La vie… en rose – juin 2010

Autre accessoire très répandu, la peluche. Ça aide sans doute à voir la vie rose. Il y en a une dizaine accrochées au téléphone de cette fille vue à la gare d’Osaka.

Il y a beaucoup de vélos au Japon, mais curieusement je n’ai vu aucune piste cyclable. Les vélos roulent sur les trottoirs et empruntent les passages pour piétons, mais ne forcent jamais le passage. Je n’ai pas entendu une seule sonnette de vélo.

Ignorant des usages nippons, j’ai même failli faire tomber une dame de son vélo parce que j’avais à tort cru opportun de m’effacer pour lui laisser le passage. Mon geste pour elle incongru lui a fait perdre l’équilibre…

Beaucoup de dames à vélo (sans doute parce qu’à l’heure où je me promenais les messieurs étaient au boulot. Elles portent tout soit un chapeau, soit une casquette, soit une visière, soit un parapluie pour se protéger du soleil.


Kyoto – Dans la rue – juin 2010

Le port du casque n’est pas incompatible avec l’usage du triporteur.

Osaka – Kansai, juin 2010, quelques instants avant le décollage

Ce salut final, discipliné, casqué et révérencieux au moment où chaque avion quitte le terminal montre bien que pour y comprendre quelque chose au Japon, il faudrait d’abord se faire traduire son mode d’emploi.

Osaka-Kansai – juin 2010

… et surtout y retourner souvent et longtemps !

Je m’aperçois que finalement, ce que j’ai vu de plus étonnant au cours de ce voyage, je ne l’ai pas photographié, tant j’étais resté interloqué par ce que je voyais et ne comprenais pas : dans ce monde urbain, apparemment assez dur, j’ai vu, notamment dans la gare d’Osaka, des enfants seuls, d’un âge auquel dans nos capitales personne ne laisse plus ses gamins circuler sans accompagnement. Joyeux, et apparemment ravis d’être là, parfaitement à l’aise, sûrs d’eux, vifs comme des papillons, ils se faufilaient entre les voyageurs vers leur quai et leur train, ce qui n’est pas tout à fait aussi simple qu’on l’imaginerait sans connaître la complexité du réseau ferroviaire japonais. Encore un signe, sans doute, de ce sens fascinant pour la discipline au Japon.

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