Voltaire, Adam et Ève, les Juifs et l’Inde

Voici ce qu’on lit dans le Dictionnaire philosophique de Voltaire, à l’article ÉZOURVEIDAM

Qu’est-ce donc que cet Ézourveidam qui est à la Bibliothèque du roi de
France ? C’est un ancien commentaire, qu’un ancien brame composa autrefois avant l’époque d’Alexandre sur l’ancien Veidam, [...].

Respectons, vous dis-je, tous ces anciens Indiens. Ils inventèrent le jeu des échecs, et les Grecs allaient apprendre chez eux la géométrie.

Cet Ézourveidam fut en dernier lieu traduit par un brame, correspondant de la malheureuse compagnie française des Indes. Il me fut apporté au mont Krapack, où j’observe les neiges depuis longtemps ; et je l’envoyai à la grande Bibliothèque royale de Paris, où il est mieux placé que chez moi.

Ceux qui voudront le consulter verront qu’après plusieurs révolutions produites par l’Éternel, il plut à l’Éternel de former un homme qui s’appelait Adimo, et une femme dont le nom répondait à celui de la vie.

Cette anecdote indienne est-elle prise des livres juifs ? les Juifs l’ont-ils copiée des Indiens ? ou peut-on dire que les uns et les autres l’ont écrite d’original, et que les beaux esprits se rencontrent ?

Il n’était pas permis aux Juifs de penser que leurs écrivains eussent rien puisé chez les brachmanes, dont ils n’avaient pas entendu parler.
Il ne nous est pas permis de penser sur Adam autrement que les Juifs. Par conséquent je me tais, et je ne pense point.

Voltaire dit se taire et s’interdire de penser ? Je n’en crois pas un mot, évidemment. Il fait mine de se conformer à l’idéal de l’Occidental imbu de sa supériorité, qui constatant la ressemblance entre Brahma et Abraham, ou entre Adimo et Adam, ne doute pas un instant du sens dans lequel s’est fait l’emprunt. Mais il n’en pense pas moins.

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