Google nous subjugue : making money while other people sleep

Posté dans divers, MOTS par kerbacho - Date : avril 1st, 2012
Je savais que Google lit et analyse les messages dans Gmail pour placer des publicités ciblées dans le champ visuel de l’utilisateur.
Je m’y étais fait et j’avais un peu oublié tout ça au fil des années. On finit par les trouver normales, toutes ces pubs et on croit même ne plus les voir.
Voici que ce matin, au moment d’envoyer depuis mon compte gmail un message (dépourvu de pièce jointe) sur des règles de typographie des noms propres dans lequel apparaissent les mots « sont joints », voici que Google Mail m’interroge en affichant le message suivant : «Aviez-vous l’intention de joindre des fichiers ? Vous avez écrit « sont joints » dans votre message, mais aucun fichier ne lui est joint. Voulez-vous envoyer le message ? »
Gmail lit notre courrier

Gmail lit notre courrier pour mieux nous ser...

J’en reste comme deux ronds de flan. La voici donc, sous des dehors de serviabilité, la main de fer dans un gant de velours. Et je me laisse faire, je me laisse serrer. Je ne peux pas m’empêcher de faire le rapprochement avec le film The Servant de Joseph Losey (scénario de Harold Pinter dont j’ai récemment apprécié la pièce Betrayal (1978)).
M.M. Wops

Tout ceci n'est donc qu'un rêve ?

Comme le résume fort bien Charles Reece :
The traumatic theme of The Servant is that subjugation of the will doesn’t always occur from the outside (the rednecks, the past, the upper class), but it’s constitutive of modern society, regardless of particular identifications. Idenitity politics couldn’t exist without it. As the saying goes, « shit rolls down hills. »

PS1 : il existe toujours au registre de commerce de la ville de Dendermonde, en Belgique, une société du nom de M.M. Wops (pour makink money while other people sleep, mêlée à des malversations à grande échelle à la fin du siècle dernier.
PS2 : Subjuguer : du latin subjugare « faire passer sous le joug; soumettre, réduire »
PS3 : Dans la pièce de H. Pinter, j’ai été sensible surtout à l’inversion de la chronologie de la narration.

Forschung

Posté dans divers, MOTS par kerbacho - Date : septembre 10th, 2011

Forschung ist die Kunst, den nächsten Schritt zu tun.
Kurt Lewin*
En hommage à Lucien dont c’est aujourd’hui le 80e anniversaire.

En français, cela donnerait quelque chose comme : la recherche est l’art de faire le pas suivant.
Ou, peut-être plus librement : la recherche est l’art de faire un pas de plus.

*cité par Pierre Bourdieu en tête du chapitre « Questions de méthode » dans « Les règles de l’art »

Amarres rompues

Posté dans MOTS, VOIR par kerbacho - Date : mai 4th, 2011

Photo Antoine Meyer

Superbe photo d’Antoine M. prise probablement en avril 2011 dans le port de Rotterdam et reprise ici en hommage appuyé à l’artiste qui s’est fait dérober hier ses outils et ses oeuvres, laissés sans surveillance dans un sac l’espace de quelques secondes.
Cruelle amputation ! Détachement forcé.
Je viens de découvrir accessoirement que le mot amarrer viendrait du moyen néerlandais aenmarren, dont le sens est attacher, un verbe aujourd’hui disparu en néerlandais. Le sens attacher du verbe amarrer est attesté dans des parlers locaux, par exemple amarrer les bêtes.

Désormais il faudra mieux amarrer tes outils ! Courage en attendant.

Le printemps arrive : Novosibirsk −9º | Ulaan Baatar −5º.

Posté dans divers, MOTS par kerbacho - Date : mars 18th, 2011

Message reçu ce matin de Shanghai. je ne résiste pas au plaisir de le partager tel quel :
«
Ni hao,(orthographe non garantie)
deuxième et dernière journée à Shanghai, de retour d’une marche d’une heure dans les rues grouillantes.

Il faut vite quitter Nian Jing rd, avenue piétonne où sont les hôtels pour occidentaux et tout ce qui va avec, magasins de luxe et marques qui inondent la planète de leurs marchandises futiles et clinquantes, fast food, et raccoleurs en tous genres, (« hello! watch,bags,dvd,ipod,ladies,masage,sex…. »), et prendre la première ruelle et en 10 mètres on change de monde.

Echoppes minuscules, regroupées par quartiers spécialisés, avec toujours un recoin où l’on mange, quelle que soit l’heure, des véhicules dans tous les sens, vélos, motos, scooters pour la plupart électriques, donc silencieux, qui vous surprennent toujours, venant de partout, sur la chaussée, à contre sens, sur le trottoir.

Le piéton ici est au bas de l’échelle de priorité. Le plus gros, le plus audacieux, le plus déterminé, celui qui a l’avertisseur sonore le plus puissant, passe d’abord.
J’ai divagué dans le quartier des vendeurs d’outillage, de pièces mécaniques.
On trouve là de tout, c’est inimaginable, et en quantité gigantesque. Roulements, courroies, moteurs, engrenages, pompes, manomètres, contacteurs, disjoncteurs, tuyaux, plaques, câbles, boîtiers, etc, etc.

Il y a de quoi approvisionner le monde entier, et d’ailleurs le monde entier vient ici s’approvisioner.

Avant hier soir, a l’arrivée, j’étais bien fatigué, mais surtout mort de faim.
J’ai été dans un restaurant situé au 5ème étage d’un batiment dévolu à la restauration.
Immense lieu divisé en petits compartiments séparés par des cloisons. Des centaines de gens mangent, s’empiffrent de plats les plus divers, boivent, parlent, crient, dans un brouhaha étonnant.

Personne ne parle autre chose que le chinois, heureusement les menus sont agrémentés de photos, pas toujours explicites, donc on a droit à des surprises, bonnes et quelques fois mauvaises.
Mais qu’importe,il n’est d’ailleurs pas toujours facile d’identifier ce qu’il y a dans l’assiette, les Chinois mangent tout, animaux, plantes, insectes, légumes, herbes, fruits bouillis, grillés, sautés, rôtis, farcis, à la vapeur… avec beaucoup d’épices.
Au final un régal et le ventre bien rempli pour une somme dérisoire.

Voila un aperçu de mon escale à Shanghai. Je retourne dans ma chambre, quelques gammes et arpèges en do mineur avant une sieste en dodo certainement mineur aussi, avant une longue nuit de retour vers Paris.
Départ 23h45 locales, 16h45 en heure flamande, arrivée prévue à 5h30 à cdg, après un long survol de la Chine, Mongolie, Sibérie, entin tu connais une partie de la route.

Le temps se réchauffe un peu en Sibérie à cette saison. À l’aller, de jour, on voyait bien les immensités enneigées et les fleuves gelés, mais il ne faisait pas trop froid: Novosibirsk −9º | Ulaan Baatar −5º.

Salut,
R.
»

en hommage à Pierre Chabert

Posté dans MOTS, REGARDER par kerbacho - Date : février 1st, 2011

Barbara Hutt vous convie à la PROJECTION de COMPAGNIE et de LA DERNIERE BANDE de Samuel Beckett

Mardi 15 février à 19h30 | COMPAGNIE | Captation avec Pierre DUX | mise en scène Pierre CHABERT
Dans Compagnie, Beckett évoque son enfance à travers de courts récits.
Beckett en général défavorable à l’adaptation scénique de ses oeuvres romanesques – écrites « pour le noir » – a cependant suivi de près le travail de mise en scène et remanié le texte. Une mise en scène sans concession de Compagnie, interprétée magistralement par Pierre Dux dont ce sera l’une des dernières apparitions sur scène. Une voix parvient à quelqu’un dans le noir.
Imaginer.

Mardi 22 février à 19h30 | LA DERNIÈRE BANDE | Captation avec Pierre CHABERT | mise en scène Samuel BECKETT
C’est dans les années soixante-dix que Samuel Beckett met en scène Pierre Chabert dans La Dernière bande. Une interprétation saluée par l’auteur – « J’aime le Krapp de Chabert ». Cette Dernière bande qui fera le tour du monde a été présentée dans le cadre du Festival Paris-Beckett 2006/2007 au Centre Georges Pompidou. Le plaisir et l’émotion de retrouver Krapp / Pierre Chabert, charismatique, incisif et romantique dans son ultime adieu à l’amour.

CENTRE CULTUREL IRLANDAIS | 5 rue des Irlandais – 75005 Paris – M° Monge / Cardinal Lemoine

Réservation indispensable: barbara.bisrepetita [a] gmail.com ou 06 86 69 56 30

Béatrix Beck

Posté dans divers, MOTS par kerbacho - Date : décembre 20th, 2010

Béatrix BeckLorsque j’ai rajouté une devise dans le chapeau de ce site, il y a près de deux ans, j’ai oublié de préciser d’où elle venait et pourquoi je l’avais mise là.

« Pas de mots plus grands que les choses » est une phrase de Béatrix Beck, reprise ici en hommage à cet écrivain, sans doute un peu oubliée aujourd’hui, qui venait de décéder fin 2008 et dont j’ai lu presque toute l’oeuvre avec beaucoup de plaisir il y a une quinzaine d’années. Malheureusement j’ai oublié dans laquelle de ses oeuvres je l’ai relevée.

J’avais été frappé par le fait que Béatrice Beck était atteinte d’amusie (elle en parle un peu dans un entretien avec Valérie Marin La Meslée pour le Magazine Littéraire). Et je pense souvent à elle à ce sujet. Cette perte de la capacité de retenir ou même de reconnaître toute mélodie n’est sans doute pas étrangère à ce qui m’attirait dans son oeuvre. Je mets ce verbe à l’imparfait car j’ignore si aujourd’hui encore j’apprécierais autant ses romans. Dans mon souvenir l’intensité de leur pouvoir évocateur et la force de son français restent intactes.
Je n’irai donc pas vérifier.

Elle souhaitait que l’on ne prononce pas le x de son nom. On dit Béatrix, comme prix ou perdrix.

Voltaire, Adam et Ève, les Juifs et l’Inde

Posté dans HINDOUSTAN, MOTS par kerbacho - Date : novembre 29th, 2010

Voici ce qu’on lit dans le Dictionnaire philosophique de Voltaire, à l’article ÉZOURVEIDAM

Qu’est-ce donc que cet Ézourveidam qui est à la Bibliothèque du roi de
France ? C’est un ancien commentaire, qu’un ancien brame composa autrefois avant l’époque d’Alexandre sur l’ancien Veidam, [...].

Respectons, vous dis-je, tous ces anciens Indiens. Ils inventèrent le jeu des échecs, et les Grecs allaient apprendre chez eux la géométrie.

Cet Ézourveidam fut en dernier lieu traduit par un brame, correspondant de la malheureuse compagnie française des Indes. Il me fut apporté au mont Krapack, où j’observe les neiges depuis longtemps ; et je l’envoyai à la grande Bibliothèque royale de Paris, où il est mieux placé que chez moi.

Ceux qui voudront le consulter verront qu’après plusieurs révolutions produites par l’Éternel, il plut à l’Éternel de former un homme qui s’appelait Adimo, et une femme dont le nom répondait à celui de la vie.

Cette anecdote indienne est-elle prise des livres juifs ? les Juifs l’ont-ils copiée des Indiens ? ou peut-on dire que les uns et les autres l’ont écrite d’original, et que les beaux esprits se rencontrent ?

Il n’était pas permis aux Juifs de penser que leurs écrivains eussent rien puisé chez les brachmanes, dont ils n’avaient pas entendu parler.
Il ne nous est pas permis de penser sur Adam autrement que les Juifs. Par conséquent je me tais, et je ne pense point.

Voltaire dit se taire et s’interdire de penser ? Je n’en crois pas un mot, évidemment. Il fait mine de se conformer à l’idéal de l’Occidental imbu de sa supériorité, qui constatant la ressemblance entre Brahma et Abraham, ou entre Adimo et Adam, ne doute pas un instant du sens dans lequel s’est fait l’emprunt. Mais il n’en pense pas moins.

Ptose

Posté dans divers, MOTS, REGARDER par kerbacho - Date : novembre 27th, 2010

Le fait de voir en ligne cette photo pourtant familière me donne un regard nouveau. Je suis intrigué par exemple par les yeux « bridés » de ce garçonnet. Ses paupières lourdes, je les ai déjà vues quelque part. Dans mes archives je retrouve ces deux photos de ma grand-mère qui mettent fin à mon interrogation.

Curieusement, c’est le mot ptose qui me vient à l’esprit. Je connaissais ce mot par lequel on désigne en médecine la descente de viscères ou d’un organe à la suite d’un relâchement de leurs tissus de soutien, non pas que j’aie fait des études d’anatomie, mais on l’apprend en cours de grec. Or je l’ai lu très récemment, utilisé aussi à propos de paupières. Je ne sais plus dans quel livre ou article il en était question à propos de « paupières affaissées ».

Des paupières lourdes et des blondes aux « yeux bridés », il y en a d’autres dans la famille ! Il va falloir que je numérise la seule photo que je connaisse de Anna Siebert (1857-1928), la mère de mon grand-père maternel, elle aussi avait les paupières lourdes, et de tout petits yeux dont a d’ailleurs hérité son unique fils.

Frappante aussi est l’expression de Marguerite, son sourire ébauché, comme retenu, son port de tête incliné, le regard légèrement par en-dessous, autant de détails que l’on pourrait être tenté d’attribuer à la pose devant le photographe. Eh bien non, il suffit de regarder n’importe quelle photo de sa petite-fille Sabine pour y retrouver le même sourire, le même port de tête, le même regard.

Insolent Tolstoï

Posté dans divers, MOTS par kerbacho - Date : novembre 22nd, 2010

La lecture de Léon Tolstoï est une de mes expériences les plus mémorables, plus précisément ses oeuvres tardives La Mort d’Ivan Illitch ou Maître et serviteur.
L’écrivain russe né en 1829 est mort, il y a tout juste cent ans, le 20 novembre 1910.
Voici comment s’ouvre le dossier qui lui est consacré à cette occasion dans le dernier numéro paru du Magazine littéraire :

« Il y a une heure encore, j’étais en train de prendre des notes sur le journal intime de Tolstoï », raconte Roland Barthes le 16 septembre 1979, après avoir achevé son Journal de deuil, commencé près de deux ans auparavant avec la mort de sa mère. Malgré la blessure, malgré le chagrin, Barthes poursuit avec humour : « Tolstoï se moque des Français, qui parlent tout le temps de leur mère. »

Plus loin, l’écrivain Dominique Fernandez montre, avec quelques citations bien choisies de romans connus (la Guerre et la Paix) ou moins connus (Résurrection), comment Tolstoï est grand et subrepticement subversif par l’emploi du mot juste quand il se moque par exemple de rituels, sociaux comme l’opéra, ou religieux comme la messe.
« Au lieu de s’en prendre directement à la hiérarchie ecclésiastique et à sa collusion avec le pouvoir politique et policier, écrit Fernandez, il avait tranquillement, par la seule force du mot juste, signalé l’imposture du système.[...] Parodier la messe sans ironie affichée, blasphémer sans blasphèmes, de même que s’en prendre à l’État, à l’armée, être révolutionnaire sans prêcher la révolution ; semer le doute et le trouble par l’usage insolent («insolent» : qui ne respecte pas l’habitude) du vocabulaire ; rester calme face à ce qui est dénoncé, sans élever la voix, ne pas s’emporter, éviter tout effet déclamatoire, voilà qui définit à la fois la pensée et le style de Tolstoï. »

Oui, il faut lire Tolstoï, aujourd’hui plus que jamais, mais attention au choix de la traduction. Je ne lis le russe ni ne connais l’original des textes cités ci-dessus, mais la traduction (sans doute récente, par Nina Gourfinkel) citée par Dominique Fernandez semble autrement plus juste que celle, par exemple, que l’on trouve gratuitement ici. Voilà ce que donne la description de l’opéra retenue par DF :

« Au milieu de la scène, il y avait des planches unies ; sur les côtés, des tableaux peints représentaient des arbres ; et derrière, une toile était tendue sur les planches. Des demoiselles en corsages rouges et jupes blanches étaient assises au milieu de la scène. L’une d’elles, très grosse, à l’écart sur un petit banc, au dos duquel était collé un carton vert. Toutes chantaient quelque chose. »

Voici la même scène dans la traduction du début du XXe siècle disponible sur www.ebooksgratuits.com :

« Des décors figurant des arbres s’élevaient de chaque côté du plancher de la scène ; des jeunes filles en jupon court et en corsage rouge se tenaient groupées au milieu ; l’une d’elles, très forte, et habillée de blanc, assise à l’écart de ses compagnes sur un escabeau, était adossée à un morceau de carton peint en vert. Toutes chantaient en chœur. »

Dominique Fernandez souligne justement que Tolstoï, décri(v)ant l’opéra vu par les yeux d’une fille de la campagne, affecte de ne parler ni de « scène » ni de « décors », ce qui serait recourir à la connaissance intellectuelle du théâtre, mais de « planches » et de « toiles peintes » et de « carton vert ». Tolstoï ne parle pas non plus de « costumes », mais de « corsages rouges et de jupes blanches ». Il n’utilise pas les mots « actrices » ou « figurantes », mais parle de « demoiselles ». Il semble qu’en russe, Tolstoï ne parle pas non plus de « choeur », mais écrit quelque chose qui ressemble à « toutes chantaient quelque chose ».
Or la traductrice (anonyme) de la version gratuite tombe dans le panneau et croit devoir arranger cette gaucherie (feinte) et utiliser le vocabulaire approprié.

Le mot juste, certes oui, mais encore faut-il que le traducteur le comprenne et le trouve à son tour.

Je remercie ici la personne chère qui, en m’en offrant une version mémorable lue à haute voix, m’a fait découvrir le chef d’oeuvre qu’est la Mort d’Ivan Illitch.

Nature morte aux pommes

Posté dans divers, MOTS, VOIR par kerbacho - Date : octobre 29th, 2010

Pommes à terre, tomber dans les pommes, tonnes de pommes, compotes de pommes.
Pom… pom… pom… pommes. Vision insolite. Épommant.

Pommes en vrac le long du canal Briegden-Neerharen - Photo d'Antoine A.

Pommes en vrac le long du canal Briegden-Neerharen – Photo d’Antoine A.
Merci Antoine.